Derrière l’image

Pony en Arizona

 
 

La route était belle et nous venions de quitter le pont historique Navajo, qui chevauche le long fleuve Colorado, celui-là même qui a sculpté des canyons extraordinaires sur ce haut plateau désertique du nord de l’Arizona. C’était le 26 avril 2022, 13h46. Mon ami Steeve et moi avions le coeur léger, car nous venions de réaliser un vieux rêve : celui d’observer et de photographier des Condors de Californie (Gymnogyps californianus) dans leur habitat du Canyon Marble. Nous roulions tranquillement, comme deux “lonesome cowboys”, en direction de Page pour passer la nuit. À la croisé d’un chemin, j’aperçus un cheval dans une improbable marre d’eau, sous le seul arbre visible à des kilomètres. Ce paysage inusité méritait bien quelques clichés.

Il y a des images qui portent une histoire et qui font réfléchir. C’est souvent dans ses imperfections qu’une image parle le plus. Nous venons tout juste de célébrer la “Journée mondiale de l’eau” le 22 mars dernier et je suis retombé sur cette photo qui me rappelle l’importance de protéger cette ressource planétaire vitale.

En préparant ce voyage en Arizona, j’ai ciblé les Montagnes Chiricahua et le village de Portal où j’avais déjà eu la chance, dans un précédent voyage, d’observer le fameux Road Runner, bip, bip, le Grand Geocoucou (Geococcyx californianus), un oiseau emblématique que Steeve souhaitait voir en priorité. En survolant la région à l’aide de “Google Map”, j’ai repéré un logement potentiel, une maison isolée, au pied des montagnes, entourée de cactus. La propriété semblait être traversée par un lit de rivière et en bas, non loin de la route, un étang était visible sur la vue aérienne. Ce point d’eau, en plein désert, était une garantie de pouvoir observer la faune de cette région aride.

Nous avons donc choisi de demeurer à cet endroit, dans la maison de Ron, un très sympathique Américain du nord qui avait acheté cette propriété, à Portal, il y a plusieurs années, pour fuir l’hiver. Le soir même de notre arrivée, nous sommes descendus, Steeve et moi, pour trouver l’étang. Il n’y avait que des caillous et des cactus, pas d’étang, pas d’eau, pas d’animaux! De retour bredouilles chez Ron, il nous expliqua que la rivière et l’étang étaient à sec depuis au moins 3 ans. Auparavant, après une forte pluie dans les montagnes, la rivière rugissait et coulait jusqu’à l’étang pendant au moins quelques semaines par années. C’était suffisant pour faire des réserves et remplir la nappe phréatique. Plus maintenant. Il nous disait aussi, tristement, que selon les autorités locales, cette région du sud-est de l’Arizona ne pourra plus étre habitée d’ici dix ans. Un paradis pour les ornithologues menacé par les changements climatiques.

Condor de Californie sur le pont historique Navajo, Arizona

Sécheresse hâtive en Arizona

Chez Ron, au pied des Montagnes Chiricahua, Arizona

 
Eric LeBel

Biologiste et photographe passionné par la nature et la biodiversité.

https://www.ericlebel.ca
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Un jeu de patience !

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